cadre de vie

Les bornes armoriées échappent à l’oubli

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Trois blocs de pierre, posés dans les champs ou aux bords du chemin, à quelques mètres seulement de l’A75 et de l’échangeur n° 5 de la Jonchère… Difficile de deviner les fines ciselures qui dessinent le blason des seigneurs de Monton vers… 1602. Pourtant, ces bornes armoriées sont des petits trésors patrimoniaux : elles gisaient là, un peu oubliées de tous après avoir pendant des siècles délimités les propriétés des seigneurs locaux. De tous ? non ! Les communes de Veyre-Monton et du Crest, APRR et les architectes des Monuments Historiques ont conduit une opération de sauvegarde de ces éléments patrimoniaux.

Cette opération financée à 100% par APRR, dans le cadre de l’élargissement de l’A75, a permis de redonner vie et de mettre en valeur ces bornes qui délimitaient les domaines féodaux puis les limites actuelles des communes de Veyre-Monton et du Crest.

Rencontre avec Yves Connier, tailleur de pierre et sculpteur, qui s’est chargé de rénover et de copier les trois bornes de Veyre-Monton et du Crest.

Rénover les bornes armoriées, c’est un travail original. Comment avez-vous organisé votre intervention ?

Je suis sculpteur et tailleur de pierre et passionné par le patrimoine. J’ai l’habitude d’intervenir localement sur les vieilles pierres. Mais, c’est la première fois que je travaillais sur des bornes armoriées datant du XVIIe siècle ou même peut-être plus anciennes. 

Il a fallu d’abord faire appel à une entreprise équipée d’un camion-grue pour extraire les bornes et les ramener dans mon atelier. J’ai ensuite éliminé le béton qui avait été posé sur ces bornes il y a quelques années. J’ai alors pu entamer la rénovation proprement dite avec un nettoyage des bornes en utilisant des produits biocides agrées par les Monuments Historiques. Objectif : éliminer la verdure et les lichens. 

Les bornes étaient fortement endommagées, par le temps bien sûr, mais elles ont aussi subi des dégâts notamment à la Révolution, car elle symbolisait le pouvoir seigneurial ; compliqué donc de refaire vivre parfaitement l’original. Je me suis appuyé sur les historiens locaux et surtout sur un héraldiste (spécialiste des blasons) pour me conseiller et ne pas faire d’erreur.

Pour les copies, comment avez-vous organisé votre travail ?

APRR a demandé effectivement de faire des copies des bornes pour conserver et exposer les originaux en lieux sûrs. Les copies doivent être remises sur le terrain.

Les copies devaient être parfaitement identiques aux originaux. J’ai donc travaillé des blocs de lave de Volvic, le matériau local par excellence. J’ai réalisé un estampage : une technique qui consiste à prendre les empreintes des bornes en réalisant un positif en plâtre. Ensuite, il suffit – si je puis dire – de faire réapparaître les reliefs sur la copie.

Que vont devenir les bornes et quels enseignements tirez-vous de cette rénovation ?

Je pense que ces bornes retracent une histoire au long cours, elle tisse un fil entre les époques. Je suis très heureux d’avoir travaillé sur cette rénovation et je me dis que ce patrimoine va enfin être plus connu et reconnu, en étant exposé dans les communes des originaux. Je trouve aussi qu’APRR et les Monuments Historiques ont eu une excellente idée en demandant à replacer les copies sur ou à proximité de leur implantation d’origine. J’ai envie de dire : « l’histoire continue… »

En tant que sculpteur et tailleur de pierre, c’était un vrai challenge. L’état de dégradation des originaux obligeait à être méthodique pour retrouver exactement les blasons et les inscriptions correspondant à l’époque et à la famille des Beaufort-Cornillac.

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Qui sont les Beaufort-Cornillac ?

Les bornes armoriées présentent le blason de la famille Beaufort-Cornillac. On retrouve trace de ce nom dès 1366 avec le Marquis de Beaufort-Cornillac. Il porte le nom (entre autres) de vicomte de la Mothe, seigneur de Pont-du-Château, des Martres, de Monton… et possède les terres actuelles du sud de Clermont-Ferrand. C’est son blason qui est gravé sur les bornes que APRR vient de faire restaurer. Mais, la famille Beaufort-Cornillac puise ses origines encore plus loin : ils sont les descendants de la famille Roger, petit seigneur Limousin du XIVe siècle qui donna à la Chrétienté… deux papes.